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j’étais le caddie, face à Mark O’Meara à Brookline. Quand on passe d’un green au tee de départ suivant, on a l’impression d’être au début d’un round dans un match de boxe !
Quel est le meilleur conseil que vous ayez donné jusqu’ici ?
DM : Ce qui compte avant tout, c’est de donner le bon club au bon moment au joueur. Il y a beaucoup de choses à prendre en compte : la force et la direction du vent, ce qui se trouve derrière le drapeau, surtout si votre joueur est survolté. On doit s’imposer sur le neuf de retour quand la pression est à son comble.
DB : La première fois que j’ai rencontré Rory, il avait 14 ans, et je me souviens lui avoir dit : “Ne change rien, continue comme ça et tu deviendras n°1 mondial.”
IM : Il s’agit surtout de faire preuve de psychologie pour amener le joueur soit à adopter une certaine façon de penser, soit à changer d’état d’esprit. Je me souviens d’une fois où Nick Doherty était particulièrement ronchon sur le parcours. Il me semble que c’était le dernier tournoi où il avait une chance de se qualifier pour le Masters. Mais ça ne se passait pas très bien et il n’arrêtait pas de répéter qu’il perdait son temps. À mi- parcours, je lui ai dit : “On n’a qu’à récupérer la balle et rentrer puisqu’on perd notre temps ici”. Cette phrase lui a fait prendre conscience que sa conduite était idiote et que nous devrions profiter au maximum de l’occasion qui s’offrait à nous. Au milieu de la dernière manche, il était en tête du tournoi, même si malheureusement il ne l’a pas gagné.
DMC : J’étais avec Padraig à Augusta et, à un moment donné, comme il arrive parfois soudainement, mon instinct m’a dit que quelque chose n’allait pas. Padraig s’apprêtait à jouer son deuxième coup, mais je lui ai dit : “Réfléchissons-y encore.” Il était prêt à déclencher son swing, mais je l’ai arrêté. Nous nous sommes concertés, nous avons décidé de prendre un autre club, et il s’avère que nous avons eu raison.
Y a-t-il des choix que vous avez faits que vous préféreriez oublier ?
DMO : Tout le monde peut faire une erreur de distance. Ça m’est arrivé plus d’une fois. Il faut simplement faire attention à ce que ça n’arrive pas trop souvent.
DB : Il n’y a pas tellement de journées que j’aimerais revivre pour en changer le cours, mais si j’en avais la possibilité, je retournerais à ce jour de 2016 où Shane Lowry était en tête de l’US Open avec quatre coups d’avance. Si j’avais eu l’expérience que j’ai
aujourd’hui, les choses auraient pu tourner
autrement...
IM : Une autre fois avec Nick Dougherty,
nous étions en tête de l’Open d’Italie à
quatre trous de l’arrivée. Nous étions sur
un par-5 où il était tout à fait possible
d’aller au green en trois coups en jouant
un coup de bois-3 au départ du tee. Mais
nous avons choisi le driver alors que cette
option mettait l’obstacle d’eau en jeu. Nous
avons fini dedans, avons inscrit un six et perdu
le tournoi. J’ai pensé que le coup était quand
même jouable avec le driver et il me semblait
que c’était le bon choix, même si certaines
personnes ont estimé par la suite, avec le recul,
que ça ne l’était pas...
BM : Je me suis déjà trompé dans le choix du club
– ce qui nous est arrivé à tous. Ça n’est pas arrivé
très souvent, mais c’est arrivé, et dans ces cas-là
on se sent on ne peut plus mal. Comme un
gardien de but qui laisse passer le ballon entre ses jambes. On peut remplir notre rôle à la perfection pendant deux ou trois heures puis faire une erreur
‘LAPREMIÈRE FOISQUEJ’AI RENCONTRÉ RORY,ILAVAIT 14ANS,ETJE MESOUVIENS LUIAVOIRDIT: “NE CHANGE RIEN, CONTINUE COMMEÇA ETTU DEVIENDRAS N°1 MONDIAL.’
qui efface tout ce que l’on a fait auparavant.
DMC : Si je fais mon boulot comme il faut, mon joueur a un tableau de la situation et un aperçu des conditions de jeu qui lui permettent de voir clairement le coup qu’il doit jouer. Ces garçons sont si forts que, s’ils arrivent à voir le coup, dix fois sur dix ils l’exécutent.
Qu’est-ce que ça fait vraiment d’être en course pour la victoire sur les derniers trous le dimanche ?
DMO : C’est pour ça que nous faisons ce métier. C’est comme une drogue, et c’est très différent de ce que l’on peut vivre habituellement : il y a l’adrénaline, les caméras qui sont braquées sur nous, les foules de spectateurs... C’est pour ça que nous supportons tous les trucs ennuyeux. C’est pour ces moments où la motivation est à son comble, où l’on se dit que la bonne décision pourrait faire une différence de plusieurs centaines de milliers de livres !
IM : Oui, c’est vrai, il y a l’adrénaline mais, personnellement, j’ai le sentiment d’avoir mieux fait mon boulot après avoir vécu cette situation deux ou trois fois. La sensation que l’on éprouve quand on joue pour la victoire est incroyable et, même si certaines personnes peuvent détester ça, je me sens plutôt calme dans ces cas- là et j’arrive à rentrer dans ma bulle.
BM : C’est incroyable, c’est la meilleure sensation du monde si vous l’acceptez. C’est pour ça qu’on fait le métier de caddie, pour avoir ces opportunités de ressentir un peu la pression et d’aider un joueur à gagner un tournoi. DMC : Dans ces moments-là, la concentration est à son comble. Les gens s’imaginent que nous sommes nerveux, mais c’est comme si toute nervosité était absorbée par la tâche à laquelle nous sommes occupés et, par conséquent, nous n’éprouvons aucune nervosité.
Comment sont les relations entre caddies rivaux ?
DMO : Super. Bon nombre d’entre nous se connaissent depuis très longtemps, même si nous travaillons aussi avec des jeunes (caddies). C’est stimulant et lorsque vous traversez des moments difficiles, vous pouvez compter sur tous les autres pour vous remonter le moral.
DB : J’ai beaucoup de chance car je considère tous les caddies comme des amis et je suis toujours heureux de sortir dîner avec eux, et cela vaut pour les nouveaux caddies – qui sont pour la plupart très sympas et de bonne compagnie.
BM : La plupart des caddies s’entendent très bien. Il y a toujours une personne avec laquelle on n’a pas trop d’atomes crochus mais, dans l’ensemble, il y a un très bon
esprit d’entraide et de camaraderie.
Pour qui aimeriez-vous caddeyer ?
DMO : Pour Freddie Couples. C’est le golfeur le plus cool qui soit, le seul pour
lequel je serais prêt à payer pour le voir jouer. Si je ne porte pas de gant, c’est parce que Freddie
n’en porte pas !
DB : Pour mon fils Alexander, qui a 7 ans... en
supposant qu’il soit assez bon.
BM : Si c’était possible, pour Tiger ou pour Rory.
DMC : Oui, pour Tiger ou pour Rory. Ce serait génial de le faire pour l’un de ces deux-là. Rory est phénoménal mais, si je pense argent, Tiger
est le meilleur joueur de l’histoire de ce sport.
Quelle est la chose la plus drôle que vous ayez vue sur le Tour ?
DMO : J’étais aux côtés de Richard Finch sur le dernier trou de l’Open d’Irlande lorsqu’il a
joué un coup de wedge et est tombé dans la rivière ! J’ai dû lui tendre un club pour l’aider à sortir de l’eau. Son coup de wedge
suivant a trouvé le green, où il est rentré en
LE SAVIEZ-
VOUS...
Ces deux caddies extrêmement expérimentés que sont Damian Moore et Brendan McCartain participent tous deux au Tour Caddy Experience. Quand ils ne sont pas sur le circuit, ils partagent leurs vastes connaissances golfiques et les histoires et les anecdotes qu’ils ont collectées sur le Tour avec des golfeurs de club.
66 worldofgolf-fr.com | fevrier 2019